Manque de personnels, conditions de travail dégradées, école inclusive sans moyen, injonctions hors sol, perte de sens du métier... La FSU-SNUipp a déposé 102 alertes sociales faisant état de l'épuisement de la profession et de la souffrance des personnels, pour mettre le ministère face à ses responsabilités et exiger des réponses fortes.
Depuis la rentrée de septembre 2023, l’évident constat d’une profession qui ne va pas bien est inquiétant. Pour de nombreuses raisons ajoutées les unes aux autres, le mal-être de la profession est grandissant, entraînant une réelle souffrance pour certain·es collègues.
Dans ce contexte, la FSU-SNUipp a déposé mardi 28 novembre 102 alertes sociales, préalables au dépôt d’un préavis de grève, pour faire part de l’état de la profession et dénoncer les conditions de travail plus que dégradées des personnels. La FSU-SNUipp 92 a adressé son alerte sociale départementale au DASEN et a également rédigé un communiqué de presse afin que l’opinion publique prenne conscience que le point de rupture est atteint dans les écoles.
Cette alerte sociale oblige le DASEN à recevoir la FSU-SNUipp 92 pour la négociation préalable au préavis de grève et à publier le relevé de conclusions de cette négociation. Nous avons été reçu·es vendredi 1er décembre.
Nous avons fait part au DASEN d’un grand nombre de motifs qui, cumulés, participent au mal-être de la profession, source de souffrance pour de plus en plus de collègues. Voici les points abordés lors de la négociation préalable :
L’école inclusive, instaurée depuis plusieurs années, ne s’est pas accompagnée de moyens suffisants pour que l’inclusion s’effectue dans des conditions convenables, entraînant un nombre de difficultés considérable dans la gestion du quotidien des écoles. Nous avons précisé que l’école inclusive ne concerne pas uniquement le handicap, mais bel et bien l’inclusion de tous les élèves à besoins éducatifs particuliers. Depuis plusieurs années, le nombre d’élèves dits « éruptifs » augmente significativement, les enseignant·es étant confronté·es au mal-être de ces élèves sans avoir les moyens de leur apporter l’aide requise. La plupart des fiches SST rédigées dans le premier degré concernent des situations de gestion de ces élèves à besoins éducatifs particuliers. Dans ces conditions, l’école inclusive est source de souffrance pour tout le monde : les équipes, les élèves, les familles. Les non-réponses, ou réponses inadaptées de la hiérarchie, sont vécues par certains personnels comme une maltraitance, les laissant sans aide pour gérer ces situations.
A cela s’ajoute le manque de personnels AESH pour accompagner les élèves qui ont une notification MDPH et qui attendent. Le rôle d’accompagnant·es des AESH est primordial pour que l’inclusion puisse se faire dans de bonnes conditions. Dans certaines écoles, des élèves qui devraient être scolarisés en ESMS sont accueillis en classe dite ordinaire par manque de places dans les établissements spécialisés. Les enseignant·es ne sont pas formé·es et n’ont pas les moyens d’assurer une inclusion digne de ce nom. Pour une école inclusive ambitieuse, il faut des moyens ambitieux !
Depuis 2008, le nombre d’enseignant·es spécialisé·es a quasiment été divisé par 4. Cette casse a de réelles conséquences sur le travail des équipes et la prise en compte des élèves à besoins éducatifs particuliers. Ces postes, alors qu’ils sont essentiels pour le bon fonctionnement des écoles et pour que l’école inclusive se fasse dans de bonnes conditions, ne sont plus attractifs. Il est primordial de reconstituer les RASED, de réinjecter des postes sur le département et de relancer les départs en formation CAPPEI.
Manque de personnels, postes encore vacants au 1er décembre, quasiment aucun remplacement court assuré, les conditions de travail se détériorent d’année en année. Les écoles fonctionnent à flux tendu en permanence, avec un nombre d’adultes, la plupart du temps, équivalent au nombre de classes. Dès qu’il y a un souci, un personnel absent, un élève en souffrance, c’est toute l’école qui dysfonctionne et qui en pâtit.
Ces conditions dégradées entraîne de facto une charge de travail supplémentaire, on en demande toujours davantage à la profession, ce qui entraîne un sentiment de perte de sens du métier, une démotivation et une fatigue chronique.
En parallèle d’un quotidien difficile à gérer, la profession subit les injonctions souvent hors sol des IEN : une formation continue sur les fondamentaux imposée alors que les personnels ont de réels autres besoins en formation, des évaluations d’écoles imposées, chronophages et dénuées de sens pour beaucoup, avec seulement 6 heures de temps dégagé, alors que les 108h explosent déjà.
Il est temps d’inverser la tendance et de faire en sorte que les conditions de travail des personnels s’améliorent : pour cela, il faut des moyens et un plan d’urgence pour l’école !
Restriction des droits des personnels, droits empêchés (mobilité, temps partiels, formation...), sentiment de mépris et d’injustice dans le traitement des demandes d’autorisation d’absence, non-réponses de l’administration, problèmes de paie... Le manque de considération et de reconnaissance ressenti par la profession entraîne une perte de confiance envers la hiérarchie et l’administration, ce qui participe également au mal-être des personnels qui se sentent méprisés et parfois maltraités. Cette perte de confiance témoigne d’un lien entre les personnels et les IEN devenu fragile, certain·es collègues ayant peur de rencontrer leur supérieur·e. Le nombre de demandes d’audiences pour souffrance a considérablement augmenté ces derniers mois. Cela doit constituer une alerte qui témoigne du mal-être de la profession.
Le DASEN a indiqué que cette alerte était pour lui précieuse, qu’il entend le constat et qu’il le prend en compte pour faire évoluer les choses.
Ecole inclusive : le DASEN est d’accord sur le fait que tous les enfants ont des besoins éducatifs particuliers. Il estime cependant que la mise en place de l’école inclusive ne s’est pas faite à moyens constants, mais qu’au contraire des moyens sont déployés et que ces moyens sont meilleurs aujourd’hui qu’autrefois. Il y a eu création de postes pour les unités d’enseignement autisme (UEEA et UEMA), de postes d’enseignants référents, d’ULIS. Le DASEN indique que le lien avec le médico-social est omniprésent, puisque de nouvelles ressources sont présentes sur le département : professeur ressource TSA, EMASCO...
AESH : le DASEN estime qu’il y a eu une véritable revalorisation dans tous les sens du terme : la formation a été repensée et une revalorisation salariale a été actée. Malgré cela, la DSDEN a des difficultés à recruter des AESH pour des raisons structurelles et contextuelles.
RASED : le DASEN pense également qu’il faut davantage de départs en formation CAPPEI. Dans ce sens, il a accordé plus de départs cette année que l’année dernière.
Postes vacants et non-remplacement : le DASEN indique qu’il y a une véritable problématique RH, que c’est le chantier principal de la DSDEN, et que chaque semaine, entre 6 et 10 contractuel·les sont recruté·es pour notre département.
Evaluation d’école : pour le DASEN, ce n’est pas quelque chose en plus mais quelque chose qui doit être au centre, pour soulever les problématiques rencontrées dans les écoles, c’est un moyen de plus pour faire réussir les élèves.
Droits des personnels : concernant les demandes d’autorisation d’absence, le DASEN refuse d’organiser un groupe de travail pour permettre un traitement attentif et harmonisé des demandes selon le motif d’absence. Il explique qu’il existe une spécificité du métier d’enseignant, lié à la nécessité de service, et que certaines absences ne peuvent être accordées avec traitement.
Concernant la mobilité, le DASEN indique qu’un effort a été fait pour les Exeat, de même pour les demandes de temps partiels.
Le relevé de conclusions de la négociation préalable est publié sur le site de la DSDEN 92.
A l’issue des échanges, compte tenu de l’inquiétude pour la profession, la FSU-SNUipp 92 maintient son préavis de grève du mardi 12 décembre 2023 jusqu’au 31 mars 2024 inclus.N’hésitez pas à contacter la FSU-SNUipp 92 pour plus d’informations ou si vous avez des questions.